Réflexions de GGA sur la démocratie participative

0
199
Shot with DXO ONE Camera

26/03/2018

La démocratie participative est un objectif partagé au sein de la majorité municipale, c’est un acquis commun, en particulier depuis 2008. C’est un objectif politique clair, avec la volonté de faire participer le plus grand nombre d’habitants.

La pratique généralisée et effective de cette démocratie participative est en même temps un but difficile à atteindre, marqué à Gentilly par des réussites certaines et des difficultés. C’est à la suite d’un certain nombre d’embûches constatées, depuis quelques mois en particulier (que nous développons ci-dessous), que Gentilly à Gauche Autrement a entamé une réflexion et des recherches sur les pratiques de démocratie participative. Le constat global est que celle-ci se porte plutôt mal dans la période récente. Il peut être observé dans diverses communes beaucoup d’annonces, de pratiques restant très institutionnelles et peu de démocratie participative réelle et de résultats pratiques. L’idée que la démocratie participative pouvait être un des remèdes à la crise du politique a du mal à fonctionner. Elle se heurte en particulier à une très faible participation des habitants, tout spécialement dans les quartiers populaires.

Nous trouvant démunis devant ce constat et ressentant le besoin d’un accompagnement théorique et pratique, ces réflexions nous ont amenés à rechercher et à suivre une formation avec un des rares experts (avec des expériences pratiques) que nous avons identifié, Patrick Norynberg (ancien DGS du Blanc Mesnil en particulier). Une idée serait d’utiliser cette formation (ou une autre) à l’intention des élus de la majorité municipale et de certains agents.

C’est en fonction de ce travail que nous vous proposons de partager nos principaux constats et propositions. Nous sommes bien sûr à votre disposition pour en parler de vive voix.

LES CONSTATS

Premier constat

À Gentilly, la démocratie participative existe et a fonctionné (avec bien sûr des aléas et de façon inégale) pour nombre de sujets. Nous citerons quatre exemples :

  • L’opération de rénovation urbaine (ORU) du Chaperon Vert. La concertation s’est déroulée sur plusieurs années. Elle a permis de recueillir de nombreux avis, en particulier avec des consultations (votes) des habitants. Le dialogue avec les locataires était essentiel en particulier pour que soit comprise et admise la durée des travaux.
  • La mise en place du stationnement payant. Une concertation longue, dans tous les quartiers, avec la mise en place d’une commission d’enquête citoyenne, ont permis de faire adopter, « sans douleur majeure », la nécessité de ce changement de culture.
  • La ZAC de la Porte de Gentilly (Marquigny). Les réunions régulières entre la mairie et deux conseils de quartier ont permis de suivre et de faire évoluer le projet, avec des explications de ce qui était possible ou pas.
  • La mise en place du budget participatif investissement. Cette innovation a pris du temps, mais s’est faite en coopération entre le maire adjoint aux finances et le groupe de travail budget des conseils de quartier. Il faut maintenant le faire vivre, le rendre visible.

Second constat

Difficulté à définir le mode de démocratie participative dans lequel on veut se situer. Les mots « concertation », « co- construction » sont employés, quelquefois indifféremment pour le même projet. Or, une définition et un choix du processus dans lequel on se trouve sont importants. En effet, sans détailler, il nous semble que la simple concertation implique que la décision finale, après échanges avec les habitants et prise en compte de leurs avis, soit prise par la collectivité publique, alors que la co-construction suppose une codécision.

Troisième constat

Difficultés sur certains dossiers. Nous citerons trois exemples :

  • L’aménagement de l’ilot Paix / Reims. Même si le « carcan » de la Métropole a joué son rôle dans l’impossibilité d’avoir une concertation réussie, deux points au moins sont à souligner. Un démarrage de la concertation plus en amont était indispensable et aurait peut-être pu éviter un engrenage improductif et fatal au projet. L’insuffisance d’organisation de la concertation dès le départ a sans doute permis à ce que nous appelons un « groupe de pression » d’imposer ses vues. Ce groupe n’a de plus pas joué le jeu de la concertation et a de ce fait une grande part dans l’échec. Nous avons donc eu tout sauf une concertation reflétant la diversité des avis des habitants.
  • Les assises de la ville. Elles ont été présentées comme un moment de prise de décisions ensemble sur le futur de notre ville (horizon 2030). La partie diagnostic s’est faite avec une participation significative à travers les « balades urbaines » et les réunions de quartier (avec des comptes rendus détaillés). Ensuite, les réunions thématiques d’élaboration n’ont pas permis réellement une construction participative. Il n’y a souvent eu qu’une (au mieux deux) réunions par thème, sans toujours de compte rendu, avec une participation faible (question certes générale sur laquelle nous reviendrons). Enfin, la partie synthèse n’a fait l’objet d’aucun processus participatif, alors que nous avions compris que ce devait être le cas. Par ailleurs, contrairement à ce qui avait été annoncé, les diverses contributions, d’associations, de conseils de quartier, n’ont pas été publiées sur le site. Le projet de ville peut et doit désormais être un point de départ pour un approfondissement du débat et aller plus loin.
  • Les avis des conseils de quartier sur le budget. Ceux-ci sont normalement obligatoires de par la Charte des Conseils de quartier. Il s’agit d’un graal à ce jour jamais atteint et y arriver est sans doute difficile. La question est celle de créer les conditions pour permettre d’émettre cet avis. Il y a celle de la « formation » aux questions budgétaires (très partiellement réalisée par les conseils de quartier avec leur brochure). La deuxième condition est de poser les problématiques du prochain budget beaucoup plus en amont qu’aujourd’hui. Ce point est identifié depuis quelques années mais n’a pu trouver de solution jusqu’alors. Une autre condition est sans doute de se concentrer sur quelques questions suffisamment concrètes, à déterminer.

Quatrième constat

L’échec relatif des récentes réunions par quartier sur le budget (« qui auraient dû fonctionner”), même si au total elles ont réuni plus de personnes que les réunions habituelles de l’ensemble des conseils de quartiers. Ce doit être pour nous tous un point d’interrogation fort. Ces réunions ont fait l’objet d’une communication large et suffisamment en amont. Les thèmes auraient dû concerner « en théorie » un nombre significatif de citoyens (« le budget c’est l’affaire de tous »). Et pourtant, la participation a été faible, et même quasi inexistante dans certains quartiers populaires. C’est notre problème n° 1 à tous. Ce point est aussi à examiner avec la question de la dynamique très inégale des conseils de quartier.

PROPOSITIONS

Nous en avons retenu plusieurs catégories, naturellement non exhaustives, à approfondir et à débattre.

  • La nécessité de clarification entre les termes et ce qui en découle de « concertation » et « co- construction ». La co-construction, avec son aspect codécisionnaire, est un processus rarement réalisé concrètement dans les collectivités jusqu’alors. Nous nous demandons s’il ne serait pas préférable d’en rester à la concertation en l’approfondissant, en l’organisant plus fortement. Une concertation peut en réalité aller très loin, jusqu’à un changement d’avis de la collectivité par rapport à ses propositions initiales.
  • Un point clé est de démarrer les concertations suffisamment en amont. C’est en particulier une condition pour créer un climat de confiance le plus tôt possible.
  • Un point crucial est celui d’une organisation systématique de la concertation. Celle-ci peut varier selon les sujets mais elle doit être annoncée à l’avance, même si une concertation est un processus qui rend cette organisation évolutive. Les points clés nous semblent être les suivants (à approfondir bien sûr), il s’agirait souvent d’une systématisation de choses qui se pratiquent de façon ponctuelle :
  • Objet de la concertation. Il doit être clairement identifié.
  • Périmètre des habitants concertés. Il doit être connu d’emblée : un quartier, toute la ville, une catégorie d’usagers…
  • Organisation des informations mises à disposition. L’information a en particulier un rôle pédagogique (avec des expositions, des visites in situ…). Elle doit intervenir très en amont et tout au long du projet. L’information partagée est essentielle à un processus de démocratie participative. L’utilisation du numérique doit s’amplifier, avec des règles d’accès…
  • Définir ce qui est prévu pour impliquer le maximum d’habitants. La question est comment éviter la « confiscation » de la concertation par les « sachants ». C’est l’importance des modalités d’information, de questionnaires, de créer des occasions de contact, « conviviaux », donnant envie de donner son avis.
  • Création d’emblée d’une instance destinée à piloter la concertation. Ceci nous semble crucial. Ce peut être un comité de pilotage, un conseil citoyen… L’important est sa composition, représentants de la mairie, des conseils de quartier, des associations, des habitants non organisés. Il faut définir et annoncer le rôle et les règles de fonctionnement, de décision de cette instance.
  • Moyens mis à la disposition de la concertation. Ils sont indispensables. Celle-ci doit être animée, il faut faire circuler l’information, faire des comptes rendus, etc.. Il s’agit de bien faire fonctionner le trio habitants / élus / services. De ce point de vue la démocratie participative a un coût, qui nécessite des arbitrages dans cette période de difficulté budgétaire.
  • Organisation de la gestion du temps, définition des délais, points d’étape prévus. Ceci variera en fonction du développement du processus, mais cette évolution doit être connue des habitants. D’une façon générale, la participation demande du temps, en particulier de pédagogie, de formation….
  • Rendu compte par la collectivité sur les avis émis par la population. Il doit être systématique. Il faut pouvoir dire pourquoi on retient tel avis, pourquoi on refuse tel autre, pourquoi on met à l’étude un troisième.
  • Modalités de consultation éventuelles (selon les projets, leurs évolutions…). Cela peut être nécessaire si le processus de concertation conduit à devoir trancher entre plusieurs scenarii (vote, autres modalités).
  • Un sujet primordial est celui de l’implication d’un maximum d’habitants, dans tous les quartiers. Nous savons tous que c’est le point le plus difficile et nous n’avons pas de solution miracle. Nous ne pouvons que rappeler qu’il existe des « techniques » que nous connaissons tous, comme « aller chercher les gens » (porte à porte), rechercher les horaires adaptés, donner à tous la parole en réunion (via des post-it ou autres..), répondre à toutes les questions (même hors sujet), réaliser des comptes rendus avec la parole de tous… Il est in fine essentiel que les habitants puissent constater que leur implication a été (d’une façon ou d’une autre) productive, de façon à ce qu’ils se sentent associés, en tirent une «fierté», une envie de poursuivre. La participation aux suites d’un projet (mise en pratique, évaluation…) est également importante.

Toute la question est de trouver des forces, des moyens, des volontaires pour animer tout cela.

  • Nous nous interrogeons enfin sur la nécessité d’élaborer une Charte, à remettre aux promoteurs privés. Il est acté à Gentilly qu’une concertation est normalement automatique pour les projets/sujets pilotés par la puissance publique. C’est en revanche plus délicat pour les opérations privées, même si la municipalité intervient souvent pour pousser les promoteurs/constructeurs à concerter. C’est d’abord un rôle de facilitateur. Cette charte devrait être la plus pratique possible, établissant les obligations attendues des opérateurs privés. Cela existe et fonctionne dans un certain nombre de villes.